20 novembre 2007
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Nom GARY RIDGWAY
Surnom : The Green River Killer" ("le tueur de la Green River").
Né le : 18 février 1949, à Salt Lake City (Utah) - Etats-Unis
Mort le : Toujours en vie. Incarcéré au pénitencier d’état de Walla Walla (état
du Washington).
Tueur en série Américain
PREAMBULE
Entre 1982 et 1985, des dizaines de jeunes femmes, pour la plupart des prostituées, disparurent dans le sud du Comté de King, dans l’état du Washington. Les premières victimes furent découvertes près de la rivière qui allait donner son surnom à leur meurtrier. Malgré des années d’enquête et des millions de dollars de dépenses, le tueur de la Green River ne fut pas appréhendé... jusqu’en 2001.
Grâce à l’ADN, la police identifia l’assassin comme étant Gary Ridgway, un homme qui figurait depuis 1983 sur la liste des suspects, mais que sa bonhomie avait permis de passer entre les mailles du filet. Sous une apparence banale et aimable, il s’avéra être une machine à tuer aussi glaciale qu’un iceberg.
La vie familiale de GARY RIDGWAY
Parents | Thomas et Mary Ridgway. Ses parents déménageait très souvent. Milieu familial modeste. |
Père | Chauffeur de bus et conduisait souvent sur l’autoroute 99 (également appelée "Pacific Highway"). Il pestait souvent contre la présence de prostituées sur une partie de cette autoroute surnommée le « Strip ». |
Mère | Travaillait comme vendeuse. C’était une femme populaire et respectée. C’est elle qui dirigeait la maison car Thomas Ridgway était un homme passif alors que Mary était très dominatrice et autoritaire. Elle avait beaucoup d’influence sur son fils. |
2 frères | Dont il ne fut jamais très proche |
Enfance | Gary Ridgway était un fils gentil et aimant qui adorait sa mère. malheureusement pour lui, elle lui en demandait beaucoup alors que le jeune garçon était assez « lent » d’esprit. Sa mère n’était jamais satisfaite de lui. C’était un enfant timide qui avait des problèmes de mémoire, de nombreuses allergies et était dyslexique. Il eut beaucoup de mal à apprendre à lire. Il éprouvait de grandes difficultés en classe et dû redoubler plusieurs fois. Il avait l’impression d’être un imbécile et un incapable qui n’arriverait jamais à rien.Il était toutefois plutôt doué de ses mains et son père lui apprit à bricoler les voitures familiales avec ses deux frères. |
Adolescence | Gary Ridgway souffrit d’énurésie (il urinait au lit) et cela dura jusqu’à l’adolescence. Lorsque cela lui arrivait, sa mère continuait de le laver elle-même, ce qui provoquait en lui un mélange pervers d’excitation sexuelle et de colère due à l’humiliation. Ridgway allait plus tard admettre qu’à cette époque, il rêvait de poignarder sa mère et de la mutiler. |
1969 | Il obtient son bac à 20 ans |
Début professionnel | Après avoir obtenu son diplôme, il travailla pour la Kenworth Motor Truck Company mais décida brusquement de s’engager dans la Navy au mois d’août 1969.Son bâtiment navigua jusqu’aux Philippines où Ridgway se mit à fréquenter les prostituées avec assiduité, au point qu’il contracta une gonorrhée (infection sexuelle appelée familièrement "chaude pisse"). |
Mariage | Epousa Claudia, sa petite amie du lycée, le 15 août 1970. Il l’emmena souvent dans des endroits boisés du comté de King, qu’il connaissait comme sa poche, pour y faire l’amour. Ils déménagèrent à San Diego quelques temps plus tard et Ridgway repartit en mission pour une durée de 6 mois. Il recommença à fréquenter les prostituées. Seule , perdue dans une ville qu’elle ne connaissait pas, Claudia s’installa avec la femme d’un autre marin parti en mer, et sortit avec d’autres hommes. |
Divorce et suites | Gary Ridgway revint le 23 juillet 1971 et décida de quitter la Navy. Son mariage battait déjà de l’aile. Son épouse et lui déménagèrent pour s’installer chez la mère de Ridgway, mais Claudia ne supportait pas son caractère despotique. En août, elle quitta définitivement Ridgway pour retourner à San Diego. Ridgway demanda le divorce en septembre, qui devint effectif en janvier 1972. Se sentant trahi, il la traita de "pute" mais ne se montra pas violent envers elle.Il rencontra plusieurs femmes, avec qui il eut des relations éphémères, et commença à fréquenter assidument les prostituées du "Strip". |
L’homme
Classiquement", Ridgway commit des actes communs à de nombreux tueurs en série. Au début de l’adolescence, il devint pyromane et mit le feu à des garages. Il ressentait beaucoup de colère et de frustration, et des pensées violentes commencèrent à le submerger peu à peu. Il aimait tuer les oiseaux dans les arbres et faire du mal aux animaux du voisinage. Il tua l’un des chats de ses parents en l’enfermant dans une glacière jusqu’à ce qu’il suffoque. Il s’en débarrassa rapidement, apeuré à l’idée que l’on découvre son acte. Il éprouva une grande satisfaction lorsqu’il comprit que personne ne le soupçonnait d’avoir tué le chat ni d’avoir mis le feu aux garages du voisinage. D’ailleurs, personne ne faisait jamais attention à lui. Ridgway se mit à voler à l’étalage et devint un voyeur qui espionnait ses voisines un peu plus âgées. Il appréciait particulièrement une adolescente de 17 ans et il lui arriva de se masturber devant sa fenêtre. Le sexe devint pour lui une obsession.
Son évolution vers son parcours meurtrier
Après son divorce en 1971, (il a alors 22 ans) Il tenta d’entrer dans la police de Seattle mais échoua aux tests de recrutement. Il retourna donc travailler dans la société Kenworth, où il peignait des carrosseries de camions. Il allait y rester durant 30 ans. L’énorme usine Kenworth était située à quelques kilomètres de la Pacific Highway, et Ridgway, qui travaillait de 6h à 15h, passait par le "Strip" tous les jours.
Ridgway était considéré comme un employé consciencieux en qui on pouvait avoir confiance, un homme gentil et amical.
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En décembre 1973, ils se marièrent et eurent un fils en septembre 1975. Sa femme se mit après la naissance de son fils, à maigrir énormément, à devenir une femme attirante, ce qui rendit Gary RIDGWAY extrèmement jaloux.
Elle finit par demander le divorce en juillet 1980. Le divorce fut prononcé en mai 1981. Ridgway obtint la garde de Matthew les week-ends et dut verser une pension alimentaire à son ex-épouse, ce qui le rendit fou de rage.
En novembre 1981, Ridgway acheta une maison à quelques centaines de mètres du Strip, sur Military Road. Il allait y habiter seul jusqu’en 1985. Il ne l’entretenait pas, les volets étaient souvent clos et ses voisins ne le voyaient presque jamais.
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En mai 1985, Judith Lynch vint habiter chez Ridgway sur Military Road. Elle commença à s’installer et à s’occuper de leur budget. Il accepta que la fille de Judith vienne s’installer avec eux durant un moment, avec son petit ami et leur bébé.
Le 12 juin 1988, Gary Ridgway se maria pour la troisième fois, avec Judith Lynch, de 5 ans son aîné
Les victimes
48 des nombreux corps de prostituées retrouvés sur une période de 3 ans près de la green river par des touristes et/ou policiers lors de l’enquête furent considérés après enquête comme étant des crimes attribués à Gary Ridgway.
L’enquête et La condamnation
Lors des premiers corps de prostitués découverts, il apparut très vite à la police, que l’enquête serait difficile et longue.
Le commandant Dick Kraske forma une force spéciale (une "Task Force") dès le 16 août 1982, composée de 25 enquêteurs du comté de King et des départements de police de Seattle, Tacoma et Kent.
Les enquêteurs du comté de King avaient interrogé près de 300 personnes, prostituées, témoins, familles et amis des victimes. Les filles du Strip, de plus en plus effrayées, commençaient à coopérer réellement avec la police, et leur rapportaient l’existence de tous les clients "bizarres" qu’elles pouvaient croiser. Ils étaient nombreux.
La Force Spéciale avait également demandé l’aide de l’Unité des Sciences du Comportement (le célèbre BSU) du FBI. Le profiler John Douglas avait créé un profil psychologique du tueur. Selon Douglas, le tueur de la Green River était un homme d’âge moyen, sûr de lui mais impulsif, qui revenait sûrement sur les lieux de ses crimes pour les "revivre" en pensée. Il était sûrement familier de la région et avait probablement de profondes convictions religieuses. Douglas pensait qu’il pouvait s’intéresser au travail de la police et tenter d’approcher les enquêteurs, voire de les aider. Dick Kraske, quant à lui, pensait que le tueur vivait probablement dans le sud du comté de King car il semblait bien connaître la Green River et les endroits reculés de la région
Si plusieurs corps avaient été découverts, il était toutefois évident qu’il en manquait encore beaucoup. Le tueur ne semblait pas, pourtant, avoir pris la peine d’enterrer ses victimes. Il avait juste couvertes certaines avec des branches. Il avait dû abandonner les autres dans des endroits reculés ou difficiles d’accès, afin qu’on ne les voit pas.
A la fin de l’année 1983, le shérif Vern Thomas demanda aux responsables politiques du comté de King d’augmenter le budget de la Force Spéciale. noyée sous une avalanche de "tuyaux", de témoignages et de suspicions, la Force Spéciale était incapable de coordonner l’afflux massif d’informations.
Les policiers acceptèrent donc l’aide de Robert Keppel, qui avait autrefois été enquêteur dans le comté de King, pour les aider à organiser leur montagne d’informations. Keppel avait dirigé l’enquête sur Ted Bundy et avait acquis une expérience qui serait sûrement profitable à la Force Spéciale. Il travaillait à présent pour la Division Criminelle du Bureau du Procureur de l’état de Washington. Il supervisait la création d’un programme appelé HITS (qui allait inspirer le futur VICAP) qui devrait "collecter, assembler et analyser les caractéristiques saillantes de tous les meurtres et les viols de l’état de Washington", afin de découvrir des points communs et donc de possibles agresseurs en série.
Keppel était un homme intelligent et organisé qui avait un don particulier pour trouver les liens entre les suspects, les dates et les endroits.Il passa trois semaines à examiner toutes les données disponibles concernant les meurtres attribués au tueur de la Green River. Lorsqu’il eut terminé son analyse, il envoya un rapport au shérif du comté de King, Vern Thomas. A la consternation de la Force Spéciale, ce rapport critiquait fortement leur enquête. Selon Keppel, si les enquêteurs voulaient trouver le tueur, ils allaient devoir changer leur manière d’agir. La majorité des informations, des preuves et indices, des dossiers et des témoignages connectés aux meurtres n’étaient absolument pas classés. Il fallait d’abord réorganiser complètement et catégoriser précisément chacune des informations. Ensuite, les similitudes et les différences entre les affaires devraient être identifiées afin de trouver des points communs qui relieraient sans le moindre doute possible les meurtres à un seul tueur.
Evidemment, une telle réorganisation allait coûter bien plus de temps et d’argent que ce que le comté avait prévu (2 millions de dollars). L’enquête était déjà la plus grande opération de l’histoire du pays. Mais il fallait absolument faire un effort considérable si l’on voulait arrêter le tueur.Au mois de décembre, Dick Kraske fut remplacé par le capitaine Frank Adamson, qui avait auparavant dirigé l’unité des affaires internes de la police. Kraske avait fait du bon travail, quoique les politiques en pensaient, mais on voulait « du sang neuf ».
Suivant les conseils de Robert Keppel, Adamson divisa les tâches et les assigna chacune à de petits groupes d’enquêteurs. Ainsi, une équipe de 8 personnes enquêta sur les crimes alors qu’une autre se consacrait uniquement à recueillir des informations sur les suspects. Trois enquêteurs furent assignés à une toute nouvelle "section d’analyse du crime", qui devait - entre autre - suivre les pistes et analyser les tendances possibles et les méthodes utilisées par le tueur. Vingt-deux enquêteurs durent développer de nouvelles stratégies pour surveiller l’activité des prostituées et les événements inhabituels sur le Strip.
Une nouvelle stratégie fut imposée par Robert Keppel, qui permit aux policiers d’éliminer rapidement des gens soupçonnés mais possédant un alibi et de se concentrer sur des suspects plus intéressants.
Le 20 février, Mike Barber, un journaliste du "Post-Intelligencer", qui avait écrit de nombreux articles sur le tueur de la Green River, reçut une enveloppe qui avait été postée à Seattle. La lettre, à l’intérieur, comportait une suite de phrases dont les mots n’étaient séparés par aucun espace. Au départ, Barber n’y comprit rien et pensa qu’il s’agissait d’un code. Mais il finit par comprendre qu’il lui fallait séparer chaque mot et que la lettre était bourrée de fautes d’orthographe et de grammaire. L’expéditeur n’avait pas été à l’école bien longtemps ou tentait de passer pour un analphabète.
La première phrase était : « whatyou eedtonoaboutthegreenriverman » = « ce que vous devez savoir au sujet de l’homme de la greenriver ». La lettre était signée « Appelez-moi Fred ». Elle proposait des mobiles aux meurtres, ce qui n’était pas bien original. Mais, Barber remarqua que l’auteur de la lettre décrivait des faits qui n’étaient connus que des enquêteurs et de quelques rares journalistes, et qui n’avaient PAS été rendus publics.Barber confia donc la lettre à Dave Reichert, qui la remit au laboratoire scientifique du bureau du shérif. On n’y découvrit qu’une seule empreinte utilisable, qui fut précieusement archivée. La lettre fut ensuite envoyée au FBI, qui identifia la machine à écrire utilisée comme une Olympia.
Sans que les policiers ne s’en rendent compte, le tueur de la Green River avait été interrogé par l’un des enquêteurs, Randy Mullinax, qui travaillait sur cette affaire depuis le début. De nouveau arrêté pour avoir sollicité les charmes d’une policière se faisant passer pour une prostituée, Gary Ridgway, calme et presque timide, avait répondu aux questions qu’on lui posait. Mullinax avait remarqué qu’on le voyait souvent sur le Strip et qu’il passait son temps à observer les "filles". Ridgway avait admis devant Mullinax qu’il aimait s’offrir les services des prostituées. Mais c’était un employé modèle, il n’avait jamais été arrêté pour aucun crime violent, il possédait sa propre maison et semblait être un homme tranquille. Mullinax l’avait laissé partir.
Un des meilleurs spécialistes dont la Force Spéciale puisse espérer le concours, Pierce Brooks, vint à Seattle pour évaluer l’enquête menée par les policiers locaux. Il était le pionnier de la recherche sur les tueurs en série et l’instigateur du VICAP (Violent Criminal Apprehension Program, semblable au HIT de Keppel) et travaillait avec le FBI dans leur centre de formation de Quantico.Il passa deux semaines à examiner le moindre détail et conclut que la Force Spéciale faisait du bon travail. Mais qu’il serait encore meilleur avec un ordinateur plus évolué et une équipe élargie, à 80 enquêteurs s’il le fallait.
Brooks dressa son propre profil du tueur, qui allait s’avérer saisissant d’exactitude. Selon Brooks, le tueur savait parfaitement où il allait abandonner les corps avant même de tuer ses victimes. Et il connaissait parfaitement ces endroits isolés. L’endroit où avaient été abandonnés les premiers corps, durant l’été 1982, étaient particulièrement familiers au tueur. Il devait vivre ou travailler tout prêt. Il fallait donc chercher qui vivait ou avait vécu ou travaillé dans ce coin précis.
Les quatre endroits où avaient été découverts des corps (au nord et au sud de l’aéroport, près de Star Lake et dans la Green River) étaient fortement boisés, isolés, en quelques sortes cachés. Brooks expliqua que le fait de cacher ses victimes n’était pas seulement utile au tueur pour ne pas être arrêté. Psychologiquement, cela lui était essentiel pour son sentiment de domination et de pouvoir : il se sentait particulièrement puissant car lui seul savait où étaient situés les corps.
La manière dont les corps étaient abandonnés dans la forêt, la maîtrise de l’environnement, la préparation minutieuse du tueur et sa manière rapide de tuer faisait que Brooks pensait que l’assassin était ou avait été un militaire. "Il est blanc... Il a des loisirs à l’extérieur, dans la nature... C’est un solitaire mais il n’est pas totalement introverti... Ce n’est pas le genre d’homme qui va facilement draguer dans les bars. Je crois que ce type est un peu anxieux de ce côté là, qu’il ne se sent pas à l’aise avec les femmes. Et c’est pour cela qu’il préfère les prostituées, qui sont pour lui les victimes les plus faciles".
Le 12 avril 1984, l’inspecteur Randy Mullinax interrogea plusieurs hommes qui avaient eu affaire aux prostitués du Strip et s’étaient faits remarquer. Parmi eux : Gary Ridgway. Ce dernier ne nia pas avoir connu deux des victimes (Keli Mcguiness et Kim Nelson) et admit avoir une obsession pour les prostituées. Il se montra ouvert, peu nerveux et sembla véritablement désireux d’aider l’enquêteur. Mullinax l’ayant déjà interrogé auparavant, il préféra le faire passer au "détecteur de mensonges" pour s’assurer de son innocence. Le 7 mai, Ridgway accepta et le spécialiste du polygraphe assura qu’il disait la vérité !
A la fin de l’été 1984, la Force Spéciale obtint enfin son ordinateur (à l’époque, il avait coûté 200 000 $) qui se révéla être d’une aide précieuse. Il allait indexer et ficher tous les indices et les noms. Grâce à sa base de données, il permettait par exemple de savoir combien de fois le nom d’un suspect apparaissait parmi les milliers de rapports écrits par les enquêteurs.
En février 1985, Ridgway fut interrogé au sujet de l’agression qu’il avait commise sur une prostituée en novembre 1982, Rebecca Quay, qui venait seulement de contacter la Force Spéciale. Il admit avoir tenté de l’étrangler mais expliqua qu’elle l’avait mordu lors d’une fellation. Comme la jeune femme ne
voulait pas porter plainte, aucune charge ne fut retenue contre lui.
A la fin de l’année 1986, l’équipe de la Force Spéciale fut diminuée de 25% et Adamson (qui devint shérif de la Maple Valley) fut remplacé par le capitaine James Pompey, un afro-américain qui travaillait dans la police depuis 1972 et avait commandé l’équipe SWAT du comté. Il réorganisa immédiatement l’équipe, ne gardant que les policiers qui enquêtaient sur le tueur depuis le début, 20 personnes en tout.
L’ordinateur doté du précieux programme conçu par Adamson, Keppel, Thomas et Revelle tournait à présent à plein régime et analysait les moindres connections existantes entre les victimes et les suspects.Un nom captura enfin l’attention des enquêteurs, celui d’un homme à l’air sympathique, qui conduisait un pick-up truck et fréquentait souvent le Strip. Un homme dont le nom apparaissait très souvent, parfois pour d’infimes détails, dans les très nombreux dossiers d’enquête que l’on avait informatisés.
Cet homme avait tenté d’étrangler une prostituée, près de l’aéroport SeaTac en juillet 1980, mais avait plaidé la légitime défense, affirmant que la jeune femme l’avait frappé pour le voler, et il avait été relâché. Il avait été interrogé par un policier du port de Seattle en 1982 alors qu’il était dans sa voiture avec une jolie jeune femme blonde du nom de Keli McGinness, l’une des victimes présumées du tueur. Randy Mullinax l’avait interrogé en février 1983. Jim Doyon lui avait parlé sur le Strip, près du carrefour où la majorité des victimes avait disparue, en 1984. Ralf McAllister l’avait interrogé en février 1985, après qu’une prostituée, Rebecca Quay, l’ait accusé d’avoir voulu l’étrangler.
Il vivait au sud de Military Road, dans une maison où le père et le petit ami de Marie Malvar avaient affirmé avoir vu l’homme qui l’avait enlevée. L’homme conduisait des pick-up trucks dont les descriptions correspondaient à celles fournies par les témoins.
Toutefois, il ne correspondait pas au profil "type" du tueur en série. Il était fiancé et heureux, il possédait sa propre maison et avait un jeune fils. En mai 1985, il était passé au détecteur de mensonges et la machine avait indiqué qu’il ne mentait pas... Il était employé depuis des années dans la même entreprise et ses supérieurs le considéraient comme un homme de confiance. Ce n’était pas un solitaire ni un paumé. Ses parents n’avaient jamais divorcé et ne l’avaient jamais battu ou violé. Il avait grandi calmement dans le sud du comté de King.Cet homme se nommait Gary Leon Ridgway, 37 ans. Il avait divorcé deux fois et avait vécu seul durant les 3 années où le Tueur de la Green River avait fait le plus de victimes, entre 1982 et 1984.
Les enquêteurs décidèrent qu’il faisait un suspect intéressant et cherchèrent à en savoir plus sur lui. Ils se mirent à le surveiller mais Ridgway, bien qu’il fréquenta assez souvent le Strip, ne commit pas le moindre délit.
Matt HaneyL’un des enquêteurs de la Force Spéciale, Matt Haney, continuait pourtant de suspecter Ridgway et chercha à en savoir plus sur lui. Il interrogea l’ex-épouse du suspect, qui lui expliqua qu’il connaissait les endroits où la majorité des victimes avaient été découvertes et qu’il l’y avait souvent emmenée. Nombre de prostituées affirmèrent avoir vu régulièrement sur le Strip cet homme ou un homme lui ressemblant, entre 1982 et 1983. Ridgway passait en fait presque tous les jours sur cette avenue pour se rendre à son travail. Cerise sur le gâteau, Ridgway avait été absent de son travail ou en congé à chaque fois qu’une victime avait disparu.
Le 8 avril 1987, la police obtint un mandat de perquisition pour fouiller sa maison, son casier à la Kenworth Trucking et les trois véhicules qu’il utilisait (son pick-up truck, le pick-up de son père et la Dodge Dart de sa fiancée, Judith Lynch). Les experts découvrirent plusieurs cordes et des bâches, mais surtout d’innombrables éclats de peintures et des fibres de moquette : Ridgway travaillant comme peintre à la compagnie Kenworth, il n’y avait là rien de surprenant.
Ridgway fut stupéfait lorsque Matt Haney, Jim Doyon et d’autres policiers se présentèrent devant chez lui. Les enquêteurs agirent rapidement et les deux détectives emmenèrent Ridgway au quartier général de la Force Spéciale. Ils le photographièrent et lui prélevèrent des cheveux et des poils pubiens. Finalement, ils prélevèrent un peu de sa salive, qui fut congelée (Haney avait lu un article sur une enquête qui s’était déroulée en Angleterre et avait été résolue grâce à une découverte particulièrement prometteuse mais aussi terriblement coûteuse : l’ADN).
Quelques semaines plus tard, les résultats des analyses furent envoyés aux enquêteurs. Ils n’étaient pas concluants. Les preuves physiques n’étaient pas assez nombreuses pour que l’on puisse arrêter Ridgway. Le procureur du comté ne voulait pas prendre de risque : si Ridgway était jugé dans un tribunal et que le manque de preuve poussait un jury à le déclarer innocent, selon les lois américaines, il ne pourrait pas être jugé une seconde fois pour les mêmes crimes. Il ne serait donc jamais condamné ! Mieux valait donc tenter d’obtenir des preuves plus solides. En juin 1987, trois garçons découvrirent le squelette à moitié enterré d’une jeune femme, Cindy Ann Smith, 17 ans, dans un ravin proche du Green River Community College. Elle avait disparu près de 3 ans auparavant.
Près d’un an plus tard, le 30 mai 1988, des ouvriers qui creusaient le sol pour construire un complexe d’appartements dans le sud de Seattle découvrirent des ossements. Les enquêteurs du Comté de King furent rapidement sur les lieux. Ils trouvèrent quelques os, des vêtements décomposés et, surtout, un crâne qui possédait encore toute ses dents. Le médecin légiste remarqua également de petits éclats de peinture blanche sur le soutien-gorge et le pull de la victime.Le crâne appartenait à Debra Estes, 15 ans, qui avait disparu 5 ans et demi ans auparavant. La construction du complexe avait commencé en 1981 mais avait été arrêtée fin 1982 par manque de financement. Elle n’avait repris qu’en 1987. Un professeur Italien, spécialiste des sols, affirma après analyses que Debra Estes avait été enterrée là en 1982.
Les enquêteurs demandèrent à la société Skip Palenik, qui possédait un excellent laboratoire dans l’Illinois, d’analyser les éclats de peinture blanche trouvés sur ses vêtements. Le laboratoire affirma que la peinture, de grande qualité et d’un prix exorbitant, était de marque Imron. Elle était utilisée pour peindre les véhicules. La Kenworth Truck Company utilisait de la peinture de la marque Imron.
La Force Spéciale semblait incapable de trouver le tueur. En 1990, l’équipe fut à nouveau réduite et ses crédits diminués. Moins de vingt personnes travaillaient à présent dans la Force Spéciale et les politiques parlaient de la faire disparaître... 15 millions de dollars avaient été dépensés en vain. Dave
Reichert lui-même, l’un des enquêteurs qui faisait partie de la Force depuis les premiers jours, fut promu au rang de sergent et quitta l’équipe.En 1991, l’équipe fut réduite à... un seul enquêteur, Tom Jensen.
Après 9 ans d’enquête, la Force Spéciale n’avait pas arrêté le tueur de la Green River. L’enquête était devenue la plus grande affaire non résolue du pays. Et pourtant, les enquêteurs possédaient de nombreux indices physiques, des fibres à foison, le sperme de l’assassin, des particules de peinture de couleurs différentes, des cheveux du tueur, des descriptions de pick-up de couleur sombre...Mais plus aucune victime ne disparaissait et la plupart des gens pensait que le tueur de la Green River était mort ou avait été emprisonné pour un autre crime.Durant 10 ans, plus rien ne fut accompli pour tenter d’appréhender l’assassin.L’évolution des techniques et l’acharnement de plusieurs enquêteurs allaient pourtant permettre de rouvrir le dossier.
Presque 20 ans après le 1er meurtre connu du tueur, le détective Dave Reichert, devenu en 1997 le shérif du comté de King, décida de recommencer l’enquête. Il voulait absolument trouver le coupable et possédait à présent un atout technologique fabuleux : l’ADN.
Reichert forma une nouvelle Force Spéciale composée de 6 membres, parmi lesquels des experts en ADN et en sciences légales, ainsi que deux enquêteurs : Tom Jensen et Jim Doyon. Toutes les preuves prélevées lors des enquêtes furent réexaminées. Certains prélèvements furent même envoyés dans des laboratoires privés pour être re-analysés avec les techniques modernes.
Grâce à une méthode de test ADN développée peu auparavant pour analyser un "vieil" ADN, ces prélèvements permirent de dresser le profil ADN du tueur, qui fut comparé aux ADN prélevés sur les principaux suspects des années auparavant. Il fallut plusieurs semaines pour mener à bien tous ces examens car la nouvelle Force Spéciale n’était pas la seule à demander des analyses ADN. Le laboratoire de l’état était débordé...
En septembre 2001, Reichert reçut finalement les résultats du labo : l’ADN provenant du sperme prélevé sur les 3 victimes correspondait à celui de la salive de Gary Leon Ridgway, prélevée en 1987.Reichert « embaucha » alors beaucoup d’anciens enquêteurs-collègues et l’équipe comprit bientôt 30 membres. Ils tentèrent de rassembler le plus de preuves possibles contre Ridgway, afin de permettre à la justice de l’inculper de tous les meurtres dont il était responsable.
Le 16 novembre 2001, Ridgway, qui avait alors 52 ans, fut arrêté par une policière qui se faisait passer pour une prostituée. Ce n’était pas la première fois et Ridgway s’en tira avec une amende. Craignant qu’il ne soit sur le point de recommencer à tuer, la nouvelle Force Spéciale décida d’agir. Sue Peters et Jon Mattsen allèrent l’interroger chez Kenworth, au sujet de la disparition de Carol Christensen. Ridgway affirma l’avoir connue dans un bar et n’être jamais sorti avec elle (alors que son sperme avait été découvert sur elle). Ils discutèrent durant deux heures et Ridgway leur expliqua très calmement sa théorie sur le tueur de la Green River. Ils quittèrent la Kenworth sans que Ridgway ne se doute de quoi que ce soit.
Il fut donc abasourdi lorsque, le 30 novembre 2001 vers 15h, il fut arrêté par Randy Mullinax et Jim Doyon dans le parking de la Kenworth Company, et fut accusé de quatre "meurtres aggravés" : ceux d’Opal Mills, Marcia Chapman, Carol Christensen et Cynthia Hinds.
Il fut conduit au Centre Judiciaire Régional de Kent où on le photographia sous toutes les coutures avant de l’interroger. Sue Peters et Matt Haney rendirent visite à son épouse, Judith, pour lui annoncer son arrestation et lui poser quelques questions. Elle affirma que Ridgway était un bon mari, un excellent père, un homme doux, gentil, qui ne se mettait jamais en colère. Elle ne crut pas les enquêteurs lorsqu’ils lui annoncèrent que Ridgway avait été arrêté quelques jours plus tôt pour avoir sollicité une prostituée. "Ce n’est pas possible. Il ne ferait pas ça". Judith se révéla être une épouse incroyablement soumise, crédule et passive. Elle avait une confiance aveugle en son époux. Elle ne se souvenait même pas de la perquisition qui avait eu lieu chez eux en 1987 et ne s’en était jamais inquiétée.
Lorsque Peters et Haney lui annoncèrent que Ridgway avait été arrêté pour les crimes du tueur de la Green River, Judith se mit à pleurer, stupéfaite, en état de choc.Ridgway ne voulut répondre à aucune question et fut placé dans une cellule particulière, surveillée 24h/24. Sa photo faisait la une de tous les journaux du pays et quelqu’un pouvait en vouloir à sa vie.
Les avocats de Ridgway se rapprochèrent alors du procureur Norm Maleng pour tenter de passer un marché : Ridgway ne serait pas condamné à mort et, en échange, non seulement il plaiderait coupable pour tous les meurtres, mais il aiderait la Force Spéciale à retrouver les corps des victimes qui n’avaient pas encore été localisés.
Maleng pesa le pour et le contre, et décida que la vérité était plus importante - pour les familles comme pour la justice - qu’une peine de mort.Norm Maleng ajouta toutefois une close à leur marché : celui-ci ne couvrait que les crimes commis dans le comté de King. Il n’aurait donc plus de valeur si Ridgway "oubliait" une victime qu’il avait pu tuer dans un autre comté ou un autre état...
En juin 2003, le bureau du procureur et les avocats de Ridgway se mirent d’accord : Ridgway devrait admettre tous les meurtres et avouer s’il avait tué avant 1982 et après 1985. Durant l’été et l’automne 2003, des enquêteurs de la Force Spéciale et des équipes de "recherche et sauvetage" accompagnèrent Ridgway dans le comté de King, afin qu’il leur indique où il avait abandonné des corps. Ils ne le lâchèrent pas d’une semelle et il vécut avec eux, dans leur quartier général, durant quatre mois !
Ridgway "rempli" son contrat et pouvait donc être jugé sans craindre la peine capitale.
Le 5 novembre 2003, en présence des familles des victimes, il plaida coupable de 42 des 48 meurtres dont il était accusé, ainsi que de 6 meurtres qui n’étaient pas sur la "liste officielle".L’accusation lut patiemment les charges retenues contre Ridgway et les noms de toutes les victimes.
Sans montrer le moindre remord, Ridgway avoua d’une voix sans émotion qu’il avait tué 48 jeunes femmes et adolescentes vulnérables, de manière préméditée.Il avait continué à tuer après 1985, après avoir rencontré sa future épouse, Judith :
Aux enquêteurs de la Force Spéciale, Ridgway parla en tout de 71 meurtres, mais il ne donna que de vagues indices et décida de n’en avouer "que" 48.Le 18 décembre 2003, le juge Richard Jones condamna 48 fois Ridgway à la perpétuité, en présence de tous les enquêteurs qui avaient travaillé sur l’affaire depuis 1982.
Les familles des victimes furent invitées à parler à Ridgway durant une dizaine de minutes, chacune. Lors d’une audience exceptionnelle, chacune des familles, frères, sœurs, parents, petits amis, époux, enfants, tous purent s’adresser à Ridgway pour lui dire enfin ce qu’ils avaient sur le cœur. Les jeunes femmes qu’il considérait comme des "détritus", des "saletés" étaient des êtres humains qui avaient aimé et avaient été aimées. Leurs morts avaient provoqué une tristesse infinie, des cauchemars, des suicides, des dépressions...
Ensuite, vint son tour de lire un texte écrit par ses avocats. Il s’y excusait d’avoir tué toutes ces "ladies", un terme bien respectueux pour des femmes qu’il considérait comme des "déchets". Il ne regarda pas les familles des victimes en lisant, mais le juge Jones.Ce dernier répondit à Ridgway : "Ce qu’il a de remarquable en vous, ce sont vos émotions recouvertes de Teflon et votre absence complète de compassion réelle pour les jeunes femmes que vous avez tuées".
En janvier 2004, Ridgway fut transféré au pénitencier d’état de Walla Walla, où il est confiné dans une petite cellule, seul, surveillé 24h/24 pour sa propre sécurité.